Réflexions autour de la distinction entre nécessité et proportionnalité

Résumé

Les notions de nécessité et de proportionnalité irriguent la matière répressive. À l’aune de ces exigences, le juge peut contrôler la conformité de la norme pénale aux principes qui lui sont supérieurs, ou encore se prononcer sur la justification d’une infraction. Il est cependant difficile de précisément cerner ce que recouvrent les exigences de nécessité et de proportionnalité. La proportionnalité est parfois considérée dans la doctrine comme une condition de la nécessité. Cette intrication des notions ressort également d’une partie de la jurisprudence française ou européenne. Or, si l’on applique les définitions de la nécessité et de la proportionnalité issues de la doctrine allemande, les contours de chacune de ces exigences se dessinent clairement, de même que leur autonomie. Cette autonomie ne peut que s’accompagner d’une séparation de l’action de l’agent en deux phases : l’action dans son principe, d’une part, et la manière de mettre en œuvre cette action, d’autre part. L’exigence de proportionnalité concerne la seconde, tandis que l’exigence de nécessité n’a vocation à s’appliquer qu’à la première.

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Mots-clés

nécessité, proportionnalité, légitimité, justification, peine, contrôle

Plan

Texte

La légitimité de l’action des forces de l’ordre n’a cessé d’être remise en cause depuis les manifestations des gilets jaunes, si bien les que les « violences policières » (Auffret, 2019) sont régulièrement au cœur des débats et que la notion de « proportionnalité » ne relève plus exclusivement du vocable des juristes. La violence des forces de l’ordre, pour être qualifiée de légitime, doit en réalité répondre à une double exigence bien connue des pénalistes : la nécessité et la proportionnalité1. Ces deux exigences irriguent la matière pénale, de l’édiction de la norme jusqu’à son application.

La norme pénale édictée par le législateur doit tout d’abord répondre à ces exigences, lesquelles sont susceptibles de faire l’objet d’un contrôle juridictionnel. Le Conseil constitutionnel (Cons. const.) peut notamment se fonder sur l’article 8 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789 afin de censurer une peine disproportionnée. Au stade de l’application de la norme pénale, et plus précisément en matière de justification, la sauvegarde d’une valeur ou la contribution à un but d’intérêt général est certes un élément essentiel, mais le juge doit également vérifier si l’atteinte à la valeur sacrifiée est nécessaire et proportionnée. À titre d’exemple et en matière de légitime défense, le sacrifice de l’intégrité d’un agresseur qui donne des coups de poing est nécessaire et proportionné lorsque l’acte défensif consiste à répondre également par des coups de poing2.

Le contrôle des exigences de nécessité et de proportionnalité en matière pénale est fréquent et susceptible d’être exercé par le juge constitutionnel, le juge européen ou le juge pénal. Néanmoins, une question mérite d’être posée : la nécessité et la proportionnalité peuvent-elles être analysées indépendamment l’une de l’autre ?

La distinction précise opérée par la doctrine allemande entre les contrôles de nécessité (Erforderlichkeit), d’adéquation (Geeignetheit) et de proportionnalité au sens strict (Verhältnismäigkeit im engeren Sinne) [Merland, 2004, p. 269 ; Xynopoulos, 1995, p. 160 et suiv.]3, a été intégrée par le Conseil constitutionnel français dans sa jurisprudence (Goesel-Le Bihan, 1997 ; Merland, 2004, p. 269). Ainsi, si la nécessité4 suppose l’utilisation du moyen le moins préjudiciable pour atteindre l’objectif, l’adéquation5 questionne le caractère adapté du moyen pour atteindre l’objectif, et la proportionnalité au sens strict6 suppose que le moyen employé n’excède pas ce qui est suffisant afin d’atteindre l’objectif (Merland, 2004, p. 269)7. Selon la doctrine constitutionnaliste (Merland, 2004, p. 269 ; Rousseau, 2001, p. 146), le « test de proportionnalité » englobe ces trois exigences que sont la nécessité, l’adéquation et la proportionnalité au sens strict. Les trois composantes de ce « test de proportionnalité » se retrouvent d’ailleurs assez nettement dans la jurisprudence de la Cour de justice de l’Union européenne (CJUE). Cette dernière a en effet précisé, à l’occasion de l’affaire Léger8, qu’afin de répondre à l’exigence de proportionnalité, « lorsqu’un choix s’offre entre plusieurs mesures appropriées, il convient de recourir à la moins contraignante de celles-ci, et […] les inconvénients causés ne doivent pas être démesurés par rapport aux objectifs visés9 ». Il s’agit bien d’un contrôle de proportionnalité au sens large, qui suppose l’adéquation (« mesures appropriées »), la nécessité (« recourir à la moins contraignante ») et la proportionnalité au sens strict (« les inconvénients causés ne doivent pas être démesurés par rapport aux objectifs visés »).

L’exigence d’adéquation ne prête guère à confusion, car il est logique d’exiger d’une mesure qu’elle permette effectivement d’atteindre l’objectif poursuivi. En revanche, la distinction entre les exigences de nécessité et de proportionnalité n’est pas aussi claire dans la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) que dans celle de la CJUE. À l’occasion de l’affaire SAS c/ France, la CEDH a par exemple affirmé que l’interdiction posée par la loi française était « proportionnée au but poursuivi » et pouvait dès lors être qualifiée de « nécessaire dans une société démocratique »10. L’affirmation de la Cour laisse entendre que la proportionnalité est une condition de la nécessité.

Cette intrication des exigences de nécessité et de proportionnalité n’est pas propre à la jurisprudence de la Cour de Strasbourg, car elle se retrouve parfois également dans la jurisprudence et la doctrine pénaliste françaises (1). L’application des définitions issues de la doctrine allemande peut alors s’avérer utile pour revenir sur ce qui distingue théoriquement la nécessité et la proportionnalité, et ce afin de préciser les places respectives qu’occupent ces exigences dans le cadre du contrôle juridictionnel (2) [Rousseau, 2021, n° 37 et suiv.].

1. Un flou jurisprudentiel et doctrinal sur la distinction entre nécessité et proportionnalité

La difficulté de saisir la différence entre les exigences de nécessité et de proportionnalité découle non seulement de la jurisprudence de la Cour de Strasbourg (1.1), mais également de la jurisprudence et de la doctrine pénaliste françaises (1.2).

1.1. Illustration de l’intrication des notions dans la jurisprudence de la CEDH

L’analyse de la jurisprudence de la Cour de Strasbourg relative au droit à la vie met en lumière une intrication des notions de nécessité et de proportionnalité. Cela ressort des termes employés dans le libellé du texte de la Convention relatif au droit à la vie, ainsi que dans la jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme.

L’ « absolue nécessité » est présentée comme une notion centrale lorsqu’il est question de justifier une atteinte à la vie. D’une part, l’article 2 de la Convention dispose que « la mort n’est pas considérée comme infligée en violation de cet article dans les cas où elle résulterait d’un recours à la force rendu absolument nécessaire » et, d’autre part, la Cour de Strasbourg souligne dans ses arrêts cette exigence d’un usage de la force meurtrière « rendu absolument nécessaire »11. Si l’article 2 de la Convention ne mentionne pas cette exigence, la Cour de Strasbourg rappelle également que la force doit être « strictement proportionnée12 » au but poursuivi. L’on pourrait penser, au regard de ces exigences, que la Cour de Strasbourg s’attache autant à la nécessité qu’à la proportionnalité lorsqu’il est question d’une atteinte à la vie.

L’on peut, en premier lieu, s’intéresser à cette conception de l’exigence de nécessité, dont la Cour de Strasbourg considère qu’elle peut varier en intensité selon les articles de la Convention concernés. En effet, la Cour de Strasbourg a pu préciser qu’en matière de droit à la vie, « il faut appliquer un critère de nécessité plus strict et impérieux que celui normalement employé pour déterminer si l’intervention de l’État est “nécessaire dans une société démocratique” au titre du paragraphe 2 des articles 8 à 11 […] de la Convention13 ». Cela suppose qu’il puisse exister différents degrés en matière de non-nécessité. Ne devrait-on pas au contraire considérer que la nécessité ne peut qu’être acquise ou faire défaut ? Si l’exigence d’un contrôle resserré semble plus cohérente en matière de proportionnalité qu’en matière de nécessité, sachant que la disproportion est quant à elle susceptible de différents degrés, l’une des affirmations de la Cour de Strasbourg doit conduire à s’interroger. En effet, la Cour termine en précisant que « la force utilisée doit en particulier être strictement proportionnée aux buts mentionnés au paragraphe 214 » de l’article relatif au droit à la vie. Dès lors, il est possible d’avoir des doutes quant à la distinction entre la nécessité et la proportionnalité dans l’esprit de la Cour de Strasbourg. En exigeant un contrôle plus strict de la nécessité, la Cour ne se plaçait-elle pas en réalité sur le terrain de la proportionnalité ?

La lecture d’un autre arrêt de la Cour de Strasbourg relatif au droit à la vie donne la réponse à cette question. À l’occasion de l’affaire Natchova et autres c/ Bulgarie, la formulation de la Grande chambre est non équivoque : « Comme le montre le texte de l’article 2 § 2 lui-même, le recours à la force meurtrière par les policiers peut se justifier dans certaines conditions. Tout usage de la force doit cependant être rendu “absolument nécessaire”, c’est-à-dire être strictement proportionné dans les circonstances15. » La Cour de Strasbourg laisse très clairement entendre que, selon sa conception, exiger une absolue nécessité consiste à exiger une stricte proportionnalité.

Ce chevauchement des notions, bien qu’il soit moins marqué, se retrouve également dans la jurisprudence et la doctrine pénaliste françaises.

1.2. Illustration de l’intrication des notions dans la jurisprudence et la doctrine pénaliste françaises

Absence de consensus. En matière pénale, le législateur a édicté des faits justificatifs afin de permettre au juge d’écarter la responsabilité pénale d’un auteur d’infraction en certaines hypothèses, telles que la légitime défense16, l’état de nécessité17 ou l’autorisation de la loi18. Dans le cadre de la légitime défense, les violences commises afin de répondre à une agression peuvent donc être justifiées, mais à la condition qu’elles soient nécessaires et proportionnées. Cette dualité d’exigences est inhérente au mécanisme de la justification. Un auteur a pu souligner que, en matière de légitime défense, la nécessité découle de « l’environnement objectif créé par l’agression » (Bernardini, 2017, n° 113). Si l’on s’en tient à ce critère, la nécessité semble pouvoir être analysée à l’aune du seul environnement et par conséquent indépendamment de la proportionnalité, cette dernière exigence concernant plutôt la façon dont l’agent va réagir dans cet environnement. Néanmoins, le même auteur considère qu’un acte défensif disproportionné ne doit pas être considéré comme nécessaire, ce qui laisse entendre que la proportionnalité est une condition de la nécessité (Bernardini, 2017, n° 93)19. La nécessité et la proportionnalité sont-elles intriquées ou indépendantes l’une de l’autre ? Cette problématique se répercute lorsqu’il s’agit d’étudier les places respectives qu’occupent ces exigences dans le cadre de la justification d’une infraction. La condition de nécessité est parfois uniquement évoquée concernant l’action dans son principe (la défense, par exemple), et quelquefois également concernant le moyen de mettre en œuvre cette action (la façon dont l’agent va se défendre). Dans le cadre du fait justificatif qu’est l’autorisation de la loi, l’on peut évoquer l’article 73 du Code de procédure pénale qui autorise – et par conséquent justifie – l’arrestation d’un individu lorsque ce dernier vient de commettre un crime flagrant ou un délit flagrant puni d’une peine d’emprisonnement. Lorsque ces conditions sont réunies, l’on pourrait penser que l’exigence de nécessité est remplie car l’arrestation est autorisée dans son principe. Or, il ressort de la jurisprudence que « l’usage, à cette fin, de la force » – c’est-à-dire le moyen de mettre en œuvre cette arrestation – « doit être nécessaire et proportionnée aux conditions de l’arrestation »20. Pourtant, dans le cadre de la légitime défense, la Cour de cassation semble ne s’intéresser qu’à la proportionnalité des « moyens de défense employés » dès lors que le principe d’une défense a été admis au regard de la situation21. Il ne semble donc pas exister de consensus sur la place de l’exigence de nécessité dans le mécanisme de la justification, ni même sur la façon d’établir cette nécessité.

Au stade de l’édiction de la norme pénale, il n’est guère plus aisé de saisir ce que recouvrent les exigences de nécessité et de proportionnalité. L’article 8 de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen, lequel impose des peines « strictement et évidemment nécessaires », est considéré par le Conseil constitutionnel comme le siège du « principe de nécessité des délits et des peines22 ». Or, le Conseil se fonde sur ce « principe de nécessité » afin de contrôler la proportionnalité des peines, ce qui ajoute à la complexité lorsque l’on souhaite comprendre ce qui distingue ces deux exigences. Pourrait-on d’ailleurs questionner la nécessité d’une peine sans remettre en cause celle de l’incrimination ?

Il semble cependant possible de distinguer plus nettement la teneur et la place des exigences de nécessité et de proportionnalité dans le cadre du contrôle juridictionnel.

2. Proposition de distinction entre les exigences de nécessité et de proportionnalité

Il est opportun de revenir sur les définitions allemandes de la nécessité et de la proportionnalité (2.1) afin de cerner plus clairement les contours de ces notions. Si l’exigence de nécessité concerne le principe d’action de l’agent, l’exigence de proportionnalité concerne davantage le moyen d’action, c’est-à-dire la façon dont l’agent va la mettre en œuvre (2.2).

2.1. Application des définitions issues de la doctrine allemande

Considérations théoriques. Les définitions issues de la doctrine allemande permettent d’entrevoir les caractéristiques des exigences de nécessité et de proportionnalité. S’il est certain que l’application des notions que sont la nécessité et la proportionnalité en droit impose une certaine souplesse, il peut néanmoins s’avérer utile de tirer les conséquences théoriques des définitions allemandes afin de saisir ce qui distingue ces notions.

Dans l’hypothèse d’un contrôle de nécessité, si l’action n’est pas la moins préjudiciable au regard des valeurs en jeu afin d’atteindre l’objectif, celle-ci est rejetée. Il n’existe donc en théorie qu’une seule et unique action susceptible de passer le contrôle de nécessité. L’action est qualifiée de « nécessaire » s’il n’y a pas de meilleure possibilité. L’exigence de proportionnalité suppose quant à elle que le moyen retenu n’excède pas ce qui est suffisant afin d’atteindre l’objectif. Le contrôle de proportionnalité s’accommode donc tout à fait d’une pluralité de moyens proportionnés possibles23. En revanche, évoquer plusieurs possibilités d’actions nécessaires est une aporie.

Il faut néanmoins préciser que la désignation de l’unique action nécessaire, aussi bien que la constatation de l’exacte proportionnalité d’un moyen relèvent de la théorie. Dans le cadre de la nécessité, mis à part peut-être dans certaines hypothèses, la recherche de l’action la moins préjudiciable peut confiner à l’exploration d’un puits sans fond. Une personne dotée d’une grande imagination pourra toujours se prévaloir d’une meilleure solution. Dans le cadre de la proportionnalité, nul ne peut affirmer quel est le point exact en dessous duquel le moyen employé s’avérerait insuffisant. L’exacte proportionnalité, qui suppose la juste suffisance du moyen, est un horizon théorique que nul ne saurait situer.

Soulignons en revanche une différence d’importance entre l’analyse de la nécessité et celle de la proportionnalité. À la différence du contrôle de proportionnalité, le contrôle de nécessité peut s’avérer tout à fait objectif dans sa dimension négative. Lorsque la nécessité d’une action est analysée, il n’est parfois nul besoin de rechercher l’unique action nécessaire pour opérer le contrôle, car la seule désignation d’une meilleure possibilité (qui n’est pas forcément la meilleure de toutes) permet de refuser le caractère nécessaire de l’action analysée. Par exemple, à l’occasion du contrôle de constitutionnalité de la loi incriminant la consultation habituelle de sites terroristes24, le Conseil constitutionnel a désigné les moyens techniques de surveillance accordés par le législateur à l’administration (lesquels permettent déjà de poursuivre l’objectif du législateur) afin de souligner le défaut de nécessité de l’incrimination25. La comparaison de deux actions au regard du préjudice qu’elles engendrent permet objectivement de rejeter la moins bonne. Le rejet d’une action à l’issue d’un contrôle de nécessité peut donc s’avérer parfaitement objectif, alors que l’admission du caractère nécessaire de l’action analysée relève de l’impossible. À l’inverse, l’analyse de la proportionnalité d’un moyen ne permet pas cette comparaison objective entre deux moyens, car cela reviendrait à opérer un contrôle de nécessité. La proportionnalité du moyen n’est analysée qu’au regard du moyen lui-même et du contexte dans lequel il s’inscrit (l’objectif à atteindre). Il ne peut donc s’agir que d’une analyse approximative, une mise en balance. Afin d’appliquer cette exigence de proportionnalité en droit, une certaine souplesse s’impose donc : un moyen peut être admis malgré une légère disproportion, sachant qu’un autre moyen d’une disproportion encore plus légère serait admis également. La marge d’admissibilité découle de l’aspect subjectif de l’analyse. Seule une disproportion importante permet de rejeter le moyen avec une certaine objectivité, mais le seuil de la disproportion manifeste est aussi abstrait et théorique que le point de l’exacte proportionnalité.

Il n’est pas étonnant, au regard de ces considérations théoriques, que l’admission de la nécessité d’une action ait également besoin d’une certaine souplesse. Dans le cadre de la justification de l’infraction, le juge pénal pourra admettre la nécessité de l’infraction lorsque certains critères légaux sont réunis : en matière de légitime défense, lorsque l’agression s’avère injuste, actuelle et réelle, la nécessité d’une défense pour l’agent est regardée comme acquise26. Dans le cadre de contrôle de nécessité de l’incrimination, le juge constitutionnel n’essaie pas d’imaginer quelle serait l’action la moins préjudiciable au regard des valeurs en jeu afin d’atteindre l’objectif du législateur27, mais il peut contester la nécessité de l’incrimination s’il constate qu’il existe déjà une mesure moins préjudiciable afin d’atteindre cet objectif (ce qui n’implique pas que la mesure déjà existante soit la moins préjudiciable possible). Autrement dit, ce contrôle de nécessité opéré par le Conseil constitutionnel est un contrôle négatif.

Il ressort surtout de ces considérations que les exigences de nécessité et de proportionnalité ne peuvent concerner un même objet. Il convient donc, afin d’opérer un contrôle au regard de cette double exigence, de séparer le principe d’action et le moyen d’action.

2.2. Nécessité du principe d’action et proportionnalité du moyen d’action

Afin de montrer l’intérêt d’une séparation entre le principe d’action et le moyen d’action pour appliquer les exigences de nécessité et de proportionnalité, l’on peut dans un premier temps évoquer le cadre de la justification de l’infraction, puis dans un second temps celui de la peine.

Nécessité et proportionnalité en matière de justification. Il convient de distinguer deux phases lorsque l’on s’interroge, par exemple, sur le caractère justifié d’un acte infractionnel. La première phase concerne l’action dans son principe, et la seconde concerne le moyen de mettre en œuvre cette action. Dans le cadre de la légitime défense, l’action dans son principe est la riposte, et le moyen d’action est la façon dont l’agent va exercer cette riposte (faire chuter l’agresseur, lui donner un coup de poing…). Dans le cadre de l’autorisation de la loi, et plus particulièrement de l’article 73 du Code de procédure pénale, l’action dans son principe est l’arrestation, et le moyen d’action est la façon dont l’agent va procéder afin de parvenir à l’arrestation (faire chuter, ceinturer…). Dans le cadre de l’état de nécessité, l’action dans son principe est la sauvegarde, tandis que le moyen d’action est l’acte choisi afin d’assurer cette sauvegarde (un vol de nourriture, la destruction d’un animal…). Dans le cadre du lancement d’alerte28, l’action dans son principe est l’alerte, tandis que le moyen d’action est le procédé choisi (le mode de divulgation) afin de mettre en œuvre cette alerte.

Il est important de souligner que c’est l’action dans son principe qui tire sa nécessité des circonstances qui s’imposent à l’individu. La nécessité justificative de l’action dans son principe est la cause de la réaction, elle préexiste à la réaction. Dans le cadre de la légitime défense, la nécessité d’une riposte justifie le sacrifice d’une valeur. C’est pourquoi la nécessité de l’action dans son principe peut être qualifiée de nécessité justificative. Cette dernière découle du fait qu’il n’existe pas de meilleure possibilité qu’une riposte. L’objectif de la réaction est alors la sauvegarde de l’intégrité de l’individu agressé.

En revanche, exiger la nécessité au stade de la réaction de l’agent, c’est-à-dire au regard de la façon dont il met en œuvre l’action, revient à ajouter un objectif diamétralement opposé à celui que poursuit initialement l’individu agressé. Il s’agit en effet d’exiger la réaction la moins préjudiciable pour l’intégrité de l’agresseur. S’il est nécessaire pour l’individu de réagir pour préserver sa propre intégrité, il doit également réagir de façon à préserver au mieux celle de son agresseur. L’individu agressé se trouve alors face à deux objectifs difficiles à concilier, face à un problème qu’il ne peut résoudre qu’en découvrant la réaction parfaite, la seule et unique pouvant être qualifiée de « meilleure réaction ». Plaçons-nous dans le cadre de la légitime défense, et imaginons l’application d’un contrôle de nécessité au stade de la réaction : un agresseur se met à donner des coups de poing. Donner un coup de poing en retour serait préjudiciable pour l’intégrité de l’agresseur. Repousser l’agresseur risquerait de le faire chuter et de porter également atteinte à son intégrité. L’immobiliser par la force semble le moyen le moins invasif pour son intégrité. Après avoir passé en revue ces trois modalités d’action possibles, la dernière doit être choisie car elle est la moins préjudiciable, mais le contrôle ne peut s’arrêter là. Il est possible de l’immobiliser en le serrant violemment, au risque de lui faire du mal ou de l’étouffer, mais il est également possible de l’immobiliser en le serrant juste suffisamment pour qu’il ne puisse plus bouger et lui laisser le temps de se calmer. Le chemin se sépare cette fois en deux directions, et il conviendra de choisir la seconde option, moins risquée pour la santé de l’agresseur. Tel un arbre aux ramifications infinies, l’analyse de la nécessité peut perdurer jusqu’à ce que l’on ait la certitude d’avoir découvert la meilleure réaction, celle qui permet une défense en préservant au maximum l’intégrité de l’agresseur. Ce contrôle étant terminé, en quoi consiste le contrôle de proportionnalité ? Il n’a absolument aucun intérêt, dès lors que la réaction parfaite a été déterminée. Pour résumer, la nécessité de l’action dans son principe naît des circonstances qui s’imposent à l’individu. En revanche, l’exigence de nécessité au stade de la réaction n’est pas une nécessité qui s’impose à l’individu du fait de la situation, mais une nécessité que le droit déciderait de lui imposer. Cette dernière nécessité, dans le cadre de la légitime défense, serait alors une exigence juridique essentiellement tournée vers une lésion minimale de l’agresseur. N’est-ce pas trop demander à l’individu agressé et amené à se défendre ?

L’exigence de proportionnalité, au stade de la réaction, semble bien plus raisonnable. C’est une exigence plus mesurée à l’égard de l’individu amené à se défendre. Il ne s’agit plus de préserver au maximum l’intégrité de l’agresseur, mais de la préserver de façon relative. Par exemple, face à un agresseur qui donne des coups de poing, l’on peut répondre par des coups de poing sans excéder ce qui est juste suffisant pour se défendre. Néanmoins, il est également possible de faire chuter l’agresseur et de le maintenir au sol jusqu’à ce qu’il se calme, sans que l’usage de ce moyen n’excède ce qui est suffisant pour assurer la défense. Il est probable que la stricte proportionnalité d’une défense par des coups de poing soit davantage préjudiciable pour l’agresseur que la stricte proportionnalité d’une défense consistant à le faire chuter et à l’immobiliser. Néanmoins, les deux méthodes peuvent être considérées comme proportionnées. En résumé, pour deux modalités d’action acceptables, la juste proportionnalité de l’un des moyens peut conduire à une lésion de l’intégrité de l’agresseur supérieure à celle à laquelle aurait conduit la juste proportionnalité de l’autre moyen. Le sacrifice de l’intégrité de l’agresseur est accepté, il est justifié et assumé, mais il doit tout de même être mesuré. L’individu agressé ne se retrouve pas dans une situation dans laquelle il doit découvrir le seul et unique « meilleur » moyen de se défendre, car il dispose d’une palette de moyens proportionnés. Le moyen qu’il choisit dans la précipitation pourra être accepté tant qu’il n’excède pas, aussi bien dans sa modalité que dans son intensité, ce qui est suffisant au regard de la gravité de la menace.

Cette distinction entre nécessité et proportionnalité est analogue s’agissant d’une peine prévue par le législateur.

Nécessité et proportionnalité de la peine. Ici, l’action dans son principe est la dissuasion29, tandis que la peine effectivement choisie est le moyen de mettre en œuvre cette dissuasion. Si la nécessité est une exigence qui concerne seulement l’action dans son principe, alors la nécessité de la peine renvoie à la nécessité d’une dissuasion. Cette nécessité découle d’une situation, c’est-à-dire du caractère problématique d’un comportement que le législateur souhaite interdire. Dès lors, la disproportion d’une peine ne remet pas en cause sa nécessité. Une peine encourue peut tout à fait être excessive, alors même que l’exigence de dissuasion impose de prévoir une incrimination assortie d’une peine. En effet, la nécessité d’une incrimination conduit à la nécessité d’une peine, car il ne peut exister d’incrimination sans peine. Par conséquent, à partir du moment où la nécessité de l’incrimination n’est pas contestée, la nécessité d’une peine est acquise30. Dès lors, quelle peine doit-on envisager ? Quelle doit être sa nature, son quantum ? Nous basculons ici dans le domaine de la proportionnalité. Une peine trop faible pour dissuader est insuffisante, tandis qu’une peine excédant ce qui est suffisant pour dissuader est disproportionnée. Il n’est pas cohérent de contrôler la nécessité à ce stade, car celle-ci est déjà acquise du fait de l’exigence d’une dissuasion. Au stade du choix de la peine, seule la proportionnalité peut être observée. Pour une même incrimination, il peut exister différentes possibilités d’établir une peine proportionnée. Le législateur dispose en effet de figures « étendues et variées » (Mayaud, 2018, p. 607) qu’il peut combiner entre elles, le tout étant d’aboutir à une peine encourue qui n’excède pas ce qui est suffisant pour dissuader le justiciable de commettre l’infraction. S’il n’est pas cohérent de s’interroger sur la proportionnalité de la dissuasion dans son principe, il n’est pas davantage cohérent de s’interroger sur la nécessité du moyen de dissuasion utilisé si l’on admet qu’il existe une pluralité de possibilités acceptables (ces possibilités engendrant des préjudices variables). Quelle serait l’utilité d’étudier les solutions alternatives dès lors que la peine analysée est proportionnée ? Les autres peines proportionnées ne sont pas plus acceptables que la peine choisie, elles sont seulement tout aussi acceptables. Il est possible d’affirmer que cinq possibilités de peines sont proportionnées, mais il serait absurde d’affirmer que cinq possibilités de peines sont nécessaires. Toutes les peines possibles et imaginables, proportionnées ou disproportionnées, procèdent d’une même nécessité liée à l’exigence d’une dissuasion. Il a été précédemment souligné que la disproportion d’une peine n’exclut pas sa nécessité, celle-ci étant liée à la nécessité de l’incrimination. L’excès dans le moyen utilisé pour dissuader ne fait aucunement disparaître la nécessité de dissuader. Lorsqu’un comportement est tellement problématique qu’il est nécessaire de l’incriminer et de le dissuader, la disproportion de la peine choisie ne fait pas disparaître le trouble causé par ce comportement. La situation persiste, la nécessité de dissuader subsiste, et la peine doit simplement être revue à la baisse. Sa proportionnalité doit être révisée, mais sa nécessité n’a pas cessé d’exister.

Afin d’opérer une distinction claire entre les exigences de nécessité et de proportionnalité, résumons les choses ainsi : la nécessité naît d’une situation, tandis que la proportionnalité s’analyse au regard de la réaction.

1 L’article L. 453-1 du Code de la sécurité intérieure, qui pose des règles communes à l’ensemble des forces de l’ordre en matière d’usage de leur

2 Cour de cassation, chambre criminelle (Cass. crim.), 17 janvier 2017, n° 15-86.481, La semaine juridique. Édition générale, 2017, p. 410, note

3 L’auteur évoque la consécration de cette distinction, née de la doctrine allemande, par la Cour constitutionnelle fédérale le 11 juin 1958.

4 Si l’objectif du législateur est la prévention du terrorisme, le fait de donner des outils techniques aux services de renseignement afin de

5 L’incrimination d’une consultation habituelle de sites terroristes est susceptible de toucher des personnes qui consultent ces sites par simple

6 Une incrimination s’avère disproportionnée dans sa rédaction lorsque le texte réprime un nombre trop large d’actes et vise par conséquent un nombre

7 Sur le contrôle de proportionnalité dans la jurisprudence du Conseil constitutionnel, voir Duclercq, 2014. Sur la proportionnalité en matière

8 CJUE, 29 avril 2015, aff. C-528/13, Léger. Voir sur cet arrêt Poupeau, 2015, p. 837.

9 CJUE, 29 avril 2015, aff. C-528/13, précit., § 58.

10 CEDH, 1er juillet 2014, SAS c/ France, § 157-158 ; § 157 : « En conséquence, notamment au regard de l’ampleur de la marge d’appréciation dont

11 CEDH, 27 septembre 1995, McCann et autres c/ Royaume-Uni, § 148.

12 CEDH, 27 septembre 1995, précit., § 149.

13 CEDH, 27 septembre 1995, précit., § 149 ; CEDH, 24 mars 2011, Giuliani et Gaggio c/ Italie, § 176.

14 « À cet égard, l’emploi des termes “absolument nécessaire” figurant à l’article 2 § 2 (art. 2-2) indique qu’il faut appliquer un critère de

15 CEDH, 6 juillet 2005, précit., § 94.

16 Article 122-5 du Code pénal.

17 Article 122-7 du Code pénal.

18 Article 122-4 du Code pénal.

19 Selon l’auteur, la proportionnalité n’est que « la traduction indispensable du caractère nécessaire de cette défense ».

20 Cass crim., 13 avril 2005, Bulletin criminel, n° 131, Dalloz, 2005, p. 2920, note J.-L. Lennon.

21 Cass crim., 17 janvier 2017, précit.

22 Cons. const., 17 mai 2019, n° 2019-783 QPC, cons. n° 9.

23 Étant entendu que ces différents moyens possibles engendrent des préjudices variables. Par exemple, la Cour de cassation accepte différentes

24 Le législateur a introduit ce délit à l’article 421-2-5-2 du Code pénal avec la loi n° 2016-731 du 3 juin 2016 sur la lutte contre le terrorisme.

25 Cons. const., 10 février 2017, précit.

26 La possibilité pour l’agent de fuir n’exclut pas la nécessité d’une défense, car l’exigence d’une impossibilité de fuite n’est pas un critère

27 Une auteure précise que, dans le cadre du contrôle de constitutionnalité, « la recherche d’une mesure alternative de nature différente est exclue 

28 Article 122-9 du Code pénal.

29 L’on pourrait évoquer d’une manière plus générale « la répression » (afin d’englober l’ensemble des finalités de la peine), mais J. Carbonnier a

30 Voir en ce sens Tillement (2003). Selon l’auteure, « l’inutilité d’une incrimination rejaillit » sur celle de la peine. Voir également Beauvais (

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Notes

1 L’article L. 453-1 du Code de la sécurité intérieure, qui pose des règles communes à l’ensemble des forces de l’ordre en matière d’usage de leur arme, exige l’absolue nécessité et la stricte proportionnalité. Le législateur reprend ici les expressions utilisées par la Cour de Strasbourg en la matière, voir Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), 6 juillet 2005, Natchova et autres c/ Bulgarie, § 94.

2 Cour de cassation, chambre criminelle (Cass. crim.), 17 janvier 2017, n° 15-86.481, La semaine juridique. Édition générale, 2017, p. 410, note Delage ; Droit pénal (Dr. pén.), 2017, comm. 54, obs. Conte.

3 L’auteur évoque la consécration de cette distinction, née de la doctrine allemande, par la Cour constitutionnelle fédérale le 11 juin 1958.

4 Si l’objectif du législateur est la prévention du terrorisme, le fait de donner des outils techniques aux services de renseignement afin de surveiller les personnes qui consultent des sites Internet terroristes est moins préjudiciable pour la liberté de communication que d’incriminer la consultation de ces sites. Le principe même de l’incrimination ne s’avère donc pas nécessaire, voir Cons. const., 10 février 2017, n° 2016-611 QPC.

5 L’incrimination d’une consultation habituelle de sites terroristes est susceptible de toucher des personnes qui consultent ces sites par simple curiosité, sans adhérer à l’idéologie véhiculée. Si l’objectif ayant motivé la rédaction de l’incrimination est la prévention du terrorisme, la répression est susceptible d’atteindre des personnes non visées par le législateur. L’incrimination s’avère alors inadéquate, voir Cons. const., 10 février 2017, précit.

6 Une incrimination s’avère disproportionnée dans sa rédaction lorsque le texte réprime un nombre trop large d’actes et vise par conséquent un nombre trop important de personnes au regard de l’objectif poursuivi par le législateur, voir par exemple Cons. const., 7 avril 2017, n° 2017-625 QPC (le Conseil censure les termes « de rechercher »).

7 Sur le contrôle de proportionnalité dans la jurisprudence du Conseil constitutionnel, voir Duclercq, 2014. Sur la proportionnalité en matière pénale, voir Léna, 2017, p. 219-228.

8 CJUE, 29 avril 2015, aff. C-528/13, Léger. Voir sur cet arrêt Poupeau, 2015, p. 837.

9 CJUE, 29 avril 2015, aff. C-528/13, précit., § 58.

10 CEDH, 1er juillet 2014, SAS c/ France, § 157-158 ; § 157 : « En conséquence, notamment au regard de l’ampleur de la marge d’appréciation dont disposait l’État défendeur en l’espèce, la Cour conclut que l’interdiction que pose la loi du 11 octobre 2010 peut passer pour proportionnée au but poursuivi, à savoir la préservation des conditions du “vivre ensemble” en tant qu’élément de la “protection des droits et libertés d’autrui” » ; § 158 : « La restriction litigieuse peut donc passer pour “nécessaire”, “dans une société démocratique”. Cette conclusion vaut au regard de l’article 8 de la Convention comme de l’article 9 ».

11 CEDH, 27 septembre 1995, McCann et autres c/ Royaume-Uni, § 148.

12 CEDH, 27 septembre 1995, précit., § 149.

13 CEDH, 27 septembre 1995, précit., § 149 ; CEDH, 24 mars 2011, Giuliani et Gaggio c/ Italie, § 176.

14 « À cet égard, l’emploi des termes “absolument nécessaire” figurant à l’article 2 § 2 (art. 2-2) indique qu’il faut appliquer un critère de nécessité plus strict et impérieux que celui normalement employé pour déterminer si l’intervention de l’État est “nécessaire dans une société démocratique” au titre du paragraphe 2 des articles 8 à 11 (art. 8-2, art. 9-2, art. 10-2, art. 11-2) de la Convention. La force utilisée doit en particulier être strictement proportionnée aux buts mentionnés au paragraphe 2 a), b) et c) de l’article 2 (art. 2-2-a-b-c) », voir CEDH, 27 septembre 1995, précit., § 149.

15 CEDH, 6 juillet 2005, précit., § 94.

16 Article 122-5 du Code pénal.

17 Article 122-7 du Code pénal.

18 Article 122-4 du Code pénal.

19 Selon l’auteur, la proportionnalité n’est que « la traduction indispensable du caractère nécessaire de cette défense ».

20 Cass crim., 13 avril 2005, Bulletin criminel, n° 131, Dalloz, 2005, p. 2920, note J.-L. Lennon.

21 Cass crim., 17 janvier 2017, précit.

22 Cons. const., 17 mai 2019, n° 2019-783 QPC, cons. n° 9.

23 Étant entendu que ces différents moyens possibles engendrent des préjudices variables. Par exemple, la Cour de cassation accepte différentes formes de ripostes face à une agression verbale : la proportionnalité peut être admise s’agissant d’un léger coup de pied, voir Cass. crim, 18 juin 2002, n° 01-88.062, Dr. pén., 2002, comm. 134, obs. Véron ; ou encore d’un jet de betterave, voir Cass. crim., 27 janvier 2015, n° 14-80.115.

24 Le législateur a introduit ce délit à l’article 421-2-5-2 du Code pénal avec la loi n° 2016-731 du 3 juin 2016 sur la lutte contre le terrorisme.

25 Cons. const., 10 février 2017, précit.

26 La possibilité pour l’agent de fuir n’exclut pas la nécessité d’une défense, car l’exigence d’une impossibilité de fuite n’est pas un critère légal prévu pour admettre la nécessité de cette défense.

27 Une auteure précise que, dans le cadre du contrôle de constitutionnalité, « la recherche d’une mesure alternative de nature différente est exclue » (Goesel-Le Bihan, 2009, p. 62-69). Le Conseil constitutionnel a en effet affirmé qu’il ne lui appartenait pas de « rechercher si les objectifs que s’est assignés le législateur auraient pu être atteints par d’autres voies, dès lors que les modalités retenues par la loi ne sont pas manifestement inappropriées à l’objectif visé », voir Cons. const., 10 juin 1998, n° 98-401 DC.

28 Article 122-9 du Code pénal.

29 L’on pourrait évoquer d’une manière plus générale « la répression » (afin d’englober l’ensemble des finalités de la peine), mais J. Carbonnier a très justement souligné qu’il n’est « nullement insolite qu’avant toute inobservation des règles diffusent préventivement l’obéissance qu’elles demandent » (1972, p. 130). L’objectif semble donc en premier lieu résider dans la dissuasion, que nous retiendrons comme « principe d’action » pour les besoins de la démonstration.

30 Voir en ce sens Tillement (2003). Selon l’auteure, « l’inutilité d’une incrimination rejaillit » sur celle de la peine. Voir également Beauvais (2018, p. 75).

Citer cet article

Référence électronique

Pierre Rousseau, « Réflexions autour de la distinction entre nécessité et proportionnalité », Amplitude du droit [En ligne], 1 | 2022, mis en ligne le 21 juin 2022, consulté le 12 décembre 2024. URL : https://amplitude-droit.pergola-publications.fr/index.php?id=275 ; DOI : https://dx.doi.org/10.56078/amplitude-droit.275

Auteur

Pierre Rousseau

Docteur en droit privé et sciences criminelles, enseignant-chercheur contractuel, Université de Nantes, Droit et changement social (DCS – UMR CNRS 6297) ; pierre.rousseau@univ-nantes.fr

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