Le droit est omniprésent en matière sportive, d’abord par l’exécution des règles du jeu et le recours au juge (Collomb, 1995), mais aussi par l’organisation du monde sportif lui-même, très pyramidal et encadré (Miege, 2009), avec de forts enjeux économiques et sociétaux. Cependant, il existe un secteur sportif dans lequel la régulation juridique présente un certain retard. Il s’agit du domaine des parasports, défini par le Comité paralympique et sportif français (CPSF) comme la pratique d’activités sportives par des personnes en situation de handicap. Cela s’explique, en partie, par le caractère relativement récent des dimensions compétitives des parasports. Le haut niveau engendre plus de réglementations, au regard de l’accroissement des intérêts.
Cet article se focalisera essentiellement sur le droit français1. Une étude de la Commission européenne s’intéressant à la pratique du sport pour les personnes en situation de handicap souligne la complexité d’accès aux informations dans ce domaine à cause de la très grande hétérogénéité des politiques des pays de l’Union (Ecorys, 2018). De plus, pour une analyse juridique précise, il est nécessaire de pouvoir comprendre et maîtriser les architectures des différentes branches du droit dans le secteur du sport, du handicap et de la santé.
Du point de vue juridique, un parasportif est titulaire de deux droits différents issus, d’une part, du droit du handicap et, d’autre part, du droit du sport. Le droit du handicap est abordé dans différents codes, mais se trouve pour l’essentiel dans le Code de l’action sociale et des familles. Le droit du sport est codifié à travers le code du même nom. Or, cette structuration en au moins deux codes distincts ne facilite pas la prise en compte des problématiques juridiques spécifiques au parasport et engendre des difficultés dans la pratique sportive quotidienne des parasportifs. Ainsi, par exemple, les para-athlètes ayant une déficience visuelle et les guides qui les assistent doivent pouvoir accéder simultanément aux équipements sportifs mais aussi avoir du temps libéré pour l’entraînement. Or, le Code du sport n’identifie pas cette nécessité de la présence d’un guide en athlétisme pour les para-athlètes ayant une déficience visuelle.
Le droit, par la loi du 15 février 20052, instaure deux leviers principaux pour permettre l’égalité des chances pour les personnes en situation de handicap : l’accessibilité et la compensation. En transposant cette logique au domaine sportif, il est possible de constater que les parasportifs se heurtent à des difficultés d’accessibilité et de compensation dans leur pratique sportive. Ces écueils sont particulièrement accrus pour les sportifs présentant une déficience physique ou sensorielle, c’est la raison pour laquelle l’étude se concentrera essentiellement sur ces publics pour lesquels l’accessibilité sportive reste limitée (1) et les possibilités de compensation demeurent restreintes (2).
1. L’accessibilité des équipements sportifs et des pratiques : un chantier à parfaire
La problématique de l’accessibilité à la pratique sportive est une question centrale. En effet, « l’accessibilité sert de clé pour déverrouiller les multiples constructions sociales qui conduisent à l’exclusion des personnes handicapées et au déni de leurs droits respectifs » (Schulze, 2010). Sans accessibilité, l’égal accès à la pratique n’est pas assuré.
Le droit international3 et le droit national4 garantissent l’accessibilité. Cependant, en dépit de cette reconnaissance unanime, la mise en œuvre du principe d’accessibilité reste délicate (1.1). Il convient d’identifier des moyens pour soutenir la mise en accessibilité (1.2).
1.1. La mise en œuvre délicate du principe d’accessibilité des équipements et des pratiques
Une étude de 2011 réalisée par le ministère des Sports établissait que seuls 6 % des équipements sportifs étaient réellement accessibles en totalité et pour tous les types de handicap5. En 2022, même si la situation a évolué positivement, les difficultés perdurent comme le soulignent l’interview de Marie-Amélie Le Fur, présidente du CPSF, dans une tribune publiée dans le quotidien sportif L’Équipe6 et les résultats de l’enquête menée par l’Observatoire de recherche sur les méga-événements : « Le manque d’équipements et leur faible accessibilité (transport, parking, chemin d’accès à l’équipement, l’accompagnement, etc.) demeurent des freins notables à la pratique d’un sport par les personnes en situation de handicap7 ».
Face à cette difficulté de mise en œuvre de l’accessibilité, le droit français a élaboré, en 2014, les agendas d’accessibilité programmée8. Ces derniers doivent permettre la mise en œuvre du principe d’accessibilité avec réalisme en tenant compte des contraintes financières et/ou techniques. Ainsi, les agendas d’accessibilité programmée suspendent les sanctions de l’article L. 152-4 du Code de la construction et de l’habitation par le biais d’un contrat conclu entre le maître de l’ouvrage et les pouvoirs publics pour effectuer dans un certain délai la mise en accessibilité des bâtiments. Le délai maximum octroyé par un agenda d’accessibilité programmé est de neuf années. Par conséquent, il sera possible d’avoir une vision réelle de l’accessibilité en France à partir de cette année 2023.
Si les développements précédents montrent que l’accessibilité du cadre bâti doit être améliorée, il convient de souligner que certaines exceptions prévues par le droit constituent de réels freins à la pratique des personnes en situation de handicap. Par exemple, la circulaire interministérielle n° 2007-53 DGUHC du 30 novembre 2007 relative à l’accessibilité des établissements recevant du public, des installations ouvertes au public et des bâtiments d’habitation précise que « les pistes de bicycle motocross ou de vélocross, skateparks, ne sauraient en revanche être considérées comme des installations ouvertes au public soumises à l’obligation d’accessibilité ».
Il convient également de souligner que certains aspects relatifs à la pratique sont entièrement négligés par la réglementation. Ainsi, l’encadrement technique relatif aux surfaces de jeu ne prend pas en considération les spécificités de la pratique des parasports en termes de résistance au roulement (Chua, Fuss, Subic, 2010). Cette omission est d’autant plus surprenante que les normes techniques existantes encadrent des exigences importantes, telles que l’absorption des chocs, pour les sportifs, valides. À titre d’exemple la norme NF P90-143, NF EN 14904 concernant les salles multisports intérieures n’évoque à aucun moment la propulsion en fauteuil roulant, alors que la qualité du revêtement est aussi fondamentale dans ce domaine. De même, le fait que les règlements techniques relèvent de la compétence des fédérations9 peut multiplier les marquages dans les salles multisports. Or, l’augmentation du nombre de lignes sur un terrain peut nuire à l’accessibilité de ce dernier pour des sportifs présentant une déficience intellectuelle.
Les analyses précédentes montrent que l’accessibilité des équipements et des pratiques, en France, reste insuffisante pour permettre un égal accès à la pratique de tous les individus. Il est donc indispensable d’identifier des outils juridiques pour y remédier.
1.2. Des outils capables de soutenir la mise en accessibilité
La stricte application de la loi de 2005 pour les établissements neufs recevant du public doit permettre d’améliorer sensiblement l’accessibilité. Il reste toutefois à gérer les travaux de mise en accessibilité des bâtiments plus anciens, lorsque cette dernière est possible. Le Comité des droits des personnes handicapées, conscient de la difficulté, fait d’ailleurs la distinction en indiquant une obligation d’accessibilité pour les bâtiments neufs et une volonté d’encourager l’accessibilité pour les bâtiments qui existent déjà (Comité des droits des personnes handicapées, 2014).
Pour permettre un meilleur accès des personnes en situation de handicap aux pratiques et aux équipements, une vision pragmatique peut être adoptée en favorisant les aménagements raisonnables et l’information autour des structures déjà accessibles.
Tout d’abord, il est possible de s’appuyer sur le concept juridique d’aménagement raisonnable10. Essentiellement utilisé en droit du travail (Dirringer, 2017 ; Défenseur des droits, 2018 ; Fillion, Guével, Roussel, 2016), il peut parfaitement être transposé à la question du sport. L’aménagement raisonnable présente l’avantage de répondre à un besoin individuel d’accessibilité. Il doit permettre à un individu dans une situation particulière d’exercer son droit (Comité des droits des personnes handicapées, 2014). Concrètement, il est envisageable d’assurer l’accès à un équipement sportif pour un individu ayant une pathologie précise, sans pour autant garantir l’accès à tous. Ainsi, par exemple, une piscine peut être considérée comme accessible à une personne en fauteuil roulant capable de se mettre à l’eau seule, alors qu’elle ne répond pas à la conception universelle en l’absence de dispositif de mise à l’eau.
L’utilisation de ce concept juridique de l’aménagement raisonnable assure ainsi une conciliation entre l’accès à un équipement et les contraintes techniques associées. Cela apparaît particulièrement pertinent pour les installations déjà existantes. L’aménagement raisonnable offre alors la possibilité d’une réponse individuelle, lorsque la conception universelle est trop délicate à mettre en œuvre11.
En plus de l’aménagement raisonnable, les registres d’accessibilité assurent une information précise des conditions d’accessibilité des établissements recevant du public12 et à ce titre facilitent l’accès aux équipements. Une personne en situation de handicap peut ainsi choisir, de façon éclairée, d’utiliser ou non un équipement en fonction de ses besoins d’accessibilité.
Partager l’information relative à l’accessibilité permet d’assurer la meilleure utilisation possible des équipements accessibles.
L’accès au registre d’accessibilité reste cependant difficile car ce n’est que sur place que l’usager peut le consulter. Or, pour un usager, il serait davantage pertinent de connaître le niveau d’accessibilité d’un lieu de pratique avant de s’y rendre. Dans cette perspective de préparation d’un déplacement vers un lieu de pratique, il apparaîtrait judicieux d’utiliser la labellisation pour informer sur l’offre d’accessibilité.
L’avantage des labellisations est qu’elles ajoutent une dimension qualitative aux informations fournies. À noter qu’il existe plusieurs formes de labellisations utilisables dans le domaine sportif. Par exemple, la norme AFNOR NF X50-783 a pour objectif d’identifier les bonnes pratiques des organismes afin de fixer un niveau d’exigence a minima pour être reconnu comme handi-accueillant, au travers de plusieurs recommandations allant de l’accessibilité à l’information au recrutement des personnes handicapées, en passant par l’accessibilité des locaux. De même, les fédérations sportives telles que la Fédération française handisport développent des politiques de labellisation (Fédération française handisport, 2023). Il est d’ailleurs regrettable que le Handiguide des sports13 porté par l’État14 n’ait pas choisi d’indiquer les structures labellisées, ce qui aurait pourtant permis d’ajouter une dimension qualitative à l’information.
Les pistes développées précédemment permettraient, dans une période transitoire, c’est-à-dire avant une mise en accessibilité complète, d’orienter de façon plus appropriée les personnes en situation de handicap vers les équipements et les pratiques sportives accessibles.
Cependant, se contenter d’aborder la question de l’accessibilité reste insuffisant pour prendre en compte de façon plus exhaustive les spécificités juridiques du parasport. Il est en effet tout aussi important de prendre en considération la problématique de la compensation, à l’image de ce que prévoit la loi de 2005. Or, si le principe de compensation est consacré par le droit, son usage reste trop limité dans le secteur sportif.
2. La prise en compte limitée de la compensation en matière sportive
Le droit à la compensation est fondé sur l’article L. 114-1-1 du Code de l’action sociale et des familles. Il vise à permettre à chaque personne de faire face aux conséquences de son handicap dans sa vie quotidienne en prenant en compte ses besoins, ses attentes et ses choix de vie.
La compensation peut être de différentes natures, mais elle a pour objectif de prendre en charge les surcoûts liés au handicap par des aides humaines, techniques ou animalières. Dans le domaine sportif, deux types de compensation présentent une importance particulière : les compensations techniques qui prennent la forme d’acquisition de matériel sportif et les compensations humaines qui se traduisent par de l’aide humaine nécessaire pour réaliser la pratique sportive. Même si ces deux aspects sont réglementés par le droit, leur usage reste trop limité pour pouvoir permettre à tous un égal accès à la pratique sportive. Il est donc à présent nécessaire d’aborder les raisons pour lesquelles la compensation humaine (2.1) et la compensation technique (2.2) sont insuffisantes.
2.1. La compensation humaine insuffisante dans le domaine sportif
Dans certaines disciplines, des parasportifs ont besoin d’une tierce personne à la fois pour aider à la réalisation du geste sportif, mais aussi pour les assister dans les gestes de la vie quotidienne. Par exemple, un guide en athlétisme court en binôme avec un para-sportif déficient visuel, mais peut aussi l’accompagner dans ses déplacements quotidiens pour aller au stade lors d’un entraînement et/ou d’une compétition, ou encore pour mettre son dossard dans la chambre d’appel. Les rôles de ces tierces personnes sont très divers en fonction des besoins du sportif, mais aussi en fonction de la discipline.
Même si ce sont souvent les mêmes personnes qui réalisent ces différentes activités, il est indispensable de distinguer les différentes fonctions qu’elles accomplissent car elles ne bénéficient pas du même traitement d’un point de vue juridique. Nous utiliserons la terminologie suivante : « aidant » lorsqu’il s’agit de réaliser des gestes de la vie quotidienne et « assistant » pour l’accompagnement à la réalisation du geste sportif.
Pour ce qui concerne la compensation dans la vie quotidienne des personnes en situation de handicap, elle est prise en charge en droit français par la Prestation de compensation du handicap. Le cadre juridique de la Prestation de compensation du handicap est fixé par les articles L. 245-1 à L. 245-14 du Code de l’action sociale et des familles. La Prestation de compensation du handicap est une aide financière accordée lorsque le bénéficiaire rencontre une difficulté absolue ou grave en ce qui concerne la mobilité, l’entretien personnel, les exigences générales et la relation à autrui. Cette prestation est modulable et varie en fonction du handicap de l’individu et de son projet de vie. Cette compensation liée à la réalisation des actes de vie quotidienne peut être particulièrement mobilisée pour les sportifs présentant une déficience intellectuelle.
La difficulté en ce qui concerne la pratique sportive est liée au fait que cette dernière n’est pas spécifiquement prévue dans l’évaluation de la Prestation de compensation du handicap. La pratique sportive entre dans le cadre plus général des actes liés à la participation sociale, limitée à 30 heures par mois (CNSA, 2017), même si un déplafonnement des heures est exceptionnellement possible. Il n’en demeure pas moins que ce forfait reste faible pour une pratique régulière relativement intense et absolument insuffisant pour une pratique compétitive. De plus, la temporalité de la Prestation de compensation du handicap, fixée sur une durée de dix ans au maximum15, est inadaptée au temps sportif. Il est en effet impossible de prévoir un calendrier de compétitions sur une telle durée puisque le principe de sélection soumet cette dernière à des résultats et donc à une forme de variabilité. Enfin, il faut souligner que les besoins de compensation sont souvent plus importants lors des compétitions sportives dans la mesure où les normes d’accessibilité ne sont pas conçues pour recevoir un nombre important de sportifs en situation de handicap. Ainsi, une personne en situation de handicap peut ne pas avoir besoin d’une compensation concernant les actes essentiels de la vie à son domicile si celui-ci est pleinement aménagé. En revanche, elle peut avoir besoin d’une aide humaine lors de ses déplacements, notamment au regard du peu de chambres d’hôtel accessibles ou en raison des contraintes de temps liées à l’événement sportif. Ainsi, un sportif en situation de handicap peut être en mesure de s’habiller seul à l’entraînement mais peut avoir besoin d’une aide humaine lorsqu’il s’agit de se changer plus rapidement ou plus fréquemment en période de compétition.
S’agissant de l’assistance au geste sportif, elle n’est pas prise en compte dans le cadre de la Prestation de compensation du handicap car elle ne relève pas des besoins essentiels. Les parasportifs de haut niveau sont alors contraints de faire appel à d’autres modes de financement. Parfois, le coût de leur assistant est pris en charge dans le cadre des aides individuelles attribuées aux sportifs. Cependant, ce type de financement concerne souvent les parasportifs de haut niveau déjà médaillés mais pas les parasportifs qui débutent une carrière dans le haut niveau, ni même les parasportifs qui pratiquent leur discipline en loisir. Dès lors, il est évident que la réglementation actuelle de la compensation du handicap constitue un frein à la pratique sportive. Actuellement, la compensation humaine qui permet aux sportifs français en situation de handicap de pratiquer leur discipline repose encore beaucoup sur des sportifs valides bénévoles.
Pour toutes ces raisons, il nous semble qu’il serait pertinent de faire évoluer le droit français pour une meilleure prise en compte des spécificités sportives en matière de compensation. L’une des pistes pertinentes serait de nommer un référent sport dans les Maisons départementales des personnes handicapées (MDPH) car celles-ci ont notamment pour fonction d’évaluer la Prestation de compensation du handicap16. Actuellement, la composition de l’équipe pluridisciplinaire dans les MDPH qui évalue les besoins des personnes en situation de handicap est variable en fonction des dossiers aux termes de l’article L. 146-8 du Code de l’action sociale et des familles. Cependant, dans la majorité des MDPH, il existe déjà des référents éducation ou emploi. La transposition de ce dispositif en matière sportive apparaît pertinente. À ce titre, il est important de mettre en lumière l’initiative de la MDPH Belfort qui dispose d’un référent sport17. Le rôle du référent sport sur la compensation humaine est de mutualiser les offres de sport pour lesquelles il existe déjà des bénévoles ou d’utiliser des réseaux de bénévoles fonctionnant déjà dans d’autres secteurs que le secteur sportif en les formant aux particularités du sport.
L’avantage de la présence d’un référent sport dans les MDPH serait aussi de permettre une meilleure prise en considération de la compensation technique en matière sportive, point qui va être développé dans les paragraphes suivants.
2.2. Une compensation technique réduite
La compensation technique en matière sportive concerne l’acquisition d’aides techniques devant permettre la réalisation de la pratique sportive. Il s’agit essentiellement des fauteuils roulants, orthèses et prothèses de sport.
La prise en charge des fauteuils roulants de sport est prévue par l’article L. 165-1 du Code de la Sécurité sociale, particulièrement par le biais de la Liste des produits et prestations remboursables (LPPR). À ce titre, un remboursement de 558,99 euros est prévu pour un fauteuil roulant manuel de sport18. Or, ces aides techniques sont très onéreuses. Décathlon, première enseigne française de matériel de sport d’entrée de gamme, propose des fauteuils à des prix d’environ 2 000 euros. Dans ces conditions, même si des compléments de financement peuvent être sollicités, notamment par le biais de la Prestation de compensation du handicap, il est évident que le prix des fauteuils reste un frein considérable à la pratique. L’État français, conscient de cette difficulté, a prévu dans la stratégie nationale sports et handicap des actions visant à la mutualisation du matériel.
L’instauration d’un référent sport au sein des MDPH pourrait résoudre une partie des difficultés liées à ces aides techniques. Par exemple, la MDPH Belfort, avec l’aide de son référent sport, a mis en place un parc de prêt de matériel. Au-delà de cet élément technique, l’étude du projet sportif par le référent sport permet d’évaluer si la pratique sportive envisagée est adaptée aux capacités de la personne en situation de handicap. Aujourd’hui, par manque de compétences techniques, il peut arriver que du matériel soit acheté alors que la personne en situation de handicap ne sait pas encore si sa pathologie est adaptée à la pratique de la discipline. Cette dimension de conseil nécessite une expertise au regard de la diversité des pathologies et du développement des pratiques de parasports. La MDPH Belfort évalue que la présence d’un référent sport lui a permis de réaliser une économie d’environ 40 000 euros sur l’achat des aides techniques19. Ce delta s’explique d’une part par le choix d’un matériel adapté au handicap du sportif et d’autre part par la mutualisation du matériel entre les différents bénéficiaires de la Prestation de compensation du handicap.
Par ailleurs, si pour les fauteuils roulants, la problématique est le surcoût après remboursement de la Sécurité sociale, pour les orthèses et les prothèses, il y a une absence totale de remboursement. L’évolution la plus récente pour ces aides techniques concerne le passage en TVA réduite à 5,5 % de ce type de produit20. Il est à souligner que ce passage à taux réduit s’est réalisé seulement en 2021. L’absence de remboursement pour les orthèses et prothèses limite de fait la pratique des sportifs en situation de handicap.
Une certaine doctrine médicale commence à mettre en lumière cette discrimination liée au non-remboursement des appareillages orthopédiques de sport pour les personnes en situation de handicap. Ces médecins défendent le zéro reste à charge pour les personnes en situation de handicap pratiquant une activité physique. Cette position, fondée sur le principe de non-discrimination, se justifie aussi par l’importance de l’activité physique en matière de santé publique. En effet, celle-ci représente une prévention primaire et secondaire efficace permettant la hausse significative de l’espérance et de la qualité de vie (Genêt, Fourny, 2022).
À travers ce dernier exemple, il est possible de mesurer comment une évolution du droit peut participer très concrètement au développement des parasports et combien, à l’inverse, l’absence d’encadrement juridique des spécificités des parasports constitue un véritable frein à leur développement. Une réflexion sur l’encadrement juridique des parasports et les applications associées aurait pour avantage de garantir un changement plus systémique facilitant de facto l’accès aux sports pour les personnes en situation de handicap dont l’intérêt a été souligné plusieurs reprises par l’Union européenne. La Commission européenne insiste sur cette question dans sa stratégie en faveur des personnes handicapées pour la période 2020-2030 (Commission européenne, 2021). La politique de l’Union européenne pourrait faciliter l’évolution du droit français dans le domaine sportif, comme cela a été le cas auparavant pour la définition même du handicap.
Cet article est l’illustration, dans le domaine sportif, de la difficile mise en œuvre des principes d’accessibilité et de compensation qui sont pourtant essentiels pour assurer l’égal accès aux droits fondamentaux des personnes en situation de handicap et plus généralement à leur bien-être (Ngo, 2020).
La tenue des Jeux paralympiques à Paris en 2024 offre sur ce point un possible accélérateur évident (Richard et al., 2020 ; Kerroumi, Forgeron, 2021).